Dernier round. Le Rhône est désert. Personne pour venir troubler une eau d’huile, si je peux m’exprimer ainsi. Nous sommes au pays des oliviers, après tout.
Les cigales s’en donnent à cœur joie, on perçoit un très léger bruit de moteur et l’eau qui coule le long de la coque. Tout semble éteint, sauf le soleil. Chauffer n’est pas le mot. Cuire serait plus proche de la réalité. Tout le monde cherche un souffle d’air, et Nathalie est devant, à quelques mètres, et rame inexorablement, comme le destin. J’imagine le calvaire qu’elle subit. Dans quelques heures, ce sera la fin de la rivière, la fin de l’eau douce.
Nous avons traversé la France dans sa hauteur. Pas dans toute sa hauteur, il aurait fallu pour cela partir de St-Valery-sur-Somme par exemple, mais tout cela n’a pas une grande importance. Nathalie Benoit serait tout à fait capable de partir de là ou d’ailleurs. Ce n’est pas une question de distance. Pas une question de résistance physique. Elle est prête pour n’importe quel défi. Celui qu’elle a lancé était contre elle-même. Et elle va le réussir, c’est évident. Elle aura vaincu l’eau, le vent et le soleil pour toucher enfin terre. Pour peut-être changer de peau, de sport, puisqu’elle parle maintenant de chevaux…
Nous arrivons à Port-St-Louis-du-Rhône après une longue attente à l’écluse qui nous séparait du secteur maritime. Au fond de la darse, une petite foule l’attend avec des bravos. Le bateau se positionne, Nathalie aborde, débarque, est aussitôt happée par des officiels, des journalistes, et disparaît. Nous avons tout juste le temps de lui faire parvenir ses béquilles bleues, ses «
jambes », comme elle dit, puis son fauteuil, et pffft ! C’est fini.
Pour le bateau, c’est terminé. Le Vision n’ira pas plus loin. C’est une sorte de tristesse, car ici s’arrête notre chemin d’eau ensemble. Demain, d’autres yeux veilleront sur ses coups de rame maritimes.
Sur le quai, un manège solitaire attend la nuit pour s’animer. La fête est presque finie. La tension se relâche, qui durait depuis un mois et demi. Nous irons, Jean-Claude et moi voir arriver Nathalie parmi la foule qui va l’attendre à Marseille. Faire la dernière photo.
Le lendemain matin, on a un peu l’impression qu’une tornade est passée. Le skiff de mer est en train d’être préparé, l’autre, qui a parcouru notre périple, est déjà arrimé sur le gonflable du club de Nathalie. Les cabines sont vides ou à peu près. Il ne reste plus qu’à ranger tout ce qui reste, et à décompresser. En croisant les doigts…
Jean-François Macaigne (POUR FLUVIAL)
NOTE => Le défi PLMR de Nathalie Benoit - déjà 37 jours ! :
=> 1er et 2ème jour - Paris puis la Haute Seine
=> 3ème jour - Haute Seine
=> 4ème jour - de la Haute Seine au canal du Loing
=> 5ème jour - Canal du Loing
=> 6ème jour - Canal du Loing
=> 7ème jour - du canal du Loing au canal de Briare
=> 8ème et 9ème jour - Canal de Briare
=> 10ème jour - du canal de Briare au canal latéral à la Loire
=> 11ème jour - Canal latéral à la Loire
=> 12ème jour - Canal latéral à la Loire
=> 13ème jour - du canal latéral à la Loire à l'embranchement de Nevers
=> 14ème jour - Canal latéral à la Loire
=> 15ème et 16ème jour - Canal latéral à la Loire
=> 17ème jour - du canal latéral à la Loire au canal du Centre
=> 18ème jour - Canal du Centre
=> 19ème jour - Canal du Centre
=> 20ème jour - Canal du Centre
=> 21ème jour - Canal du Centre
=> 22ème jour - Canal du Centre
=> 23ème jour - du canal du Centre à la Saône
=> 24ème jour - Saône
=> 25ème jour - Saône
=> 26ème jour - Saône
=> 27ème jour - Saône
=> 28ème jour - Saône
=> 29ème et 30ème jour - Rhône
=> 31ème jour - Rhône
=>32ème jour - Rhône
=>33ème jour - Rhône
=>34ème jour - Rhône
=>35ème jour - Rhône
=>36ème jour - Rhône
=>37ème jour - Rhône